3 questions à Marie Treibert

Autrice et vulgarisatrice scientifique Créatrice de la chaîne La boîte à curiosités

Qu’est-ce qu’être résilient ? Est-ce qu’il est facile de parler d’écologie sur les réseaux sociaux ? Et d’ailleurs… quel est l’animal le plus résilient ? On a posé toutes ces questions à l’une des fidèles ambassadrices du festival, spécialiste et défenseuse de la biodiversité sur les internets : Marie Treibert de la chaîne La boîte à curiosité !

Selon toi, quel est l’animal le plus résilient ?

Instinctivement, je pense au tardigrade, cet animal microscopique qu’on surnomme “ourson d’eau”, et que l’on croirait tout droit sorti d’un conte de science-fiction.

Quand son monde devient invivable, il se replie sur lui-même, se déshydrate presque totalement, réduit son métabolisme à l’état de murmure : moins d’un dix-millième de son activité normale, et attend que les bonnes conditions de vie viennent le réveiller.

Dans ce sommeil profond, il traverse des décennies, supporte le vide spatial, les radiations, la congélation. Mieux : il répare ses propres blessures, recolle son ADN brisé, invente des boucliers invisibles contre les rayons UV.

Ce n’est pas une indestructibilité arrogante : c’est un art humble de la survie. Le tardigrade, en un sens, accepte la crise, se transforme, se reconstruit, et reprend vie quand tout semble perdu.

J’aime penser que le tardigrade nous rappelle qu’aucune crise n’est une fin absolue si nous savons adapter nos corps, nos sociétés et nos imaginaires pour persister et renaître.

Selon toi, c’est quoi être résilient ?

Au départ, la résilience est un concept de physique : c’est la capacité d’un matériau à encaisser un choc, à se plier sans rompre, puis à retrouver une forme fonctionnelle.

Les sciences de la vie ouvrent cette idée pour parler des organismes, des écosystèmes, des sociétés.

Être résilient, ce n’est pas seulement survivre : c’est absorber la perturbation, réparer, parfois se transformer. Une forêt qui brûle et repousse autrement, une barrière de corail qui se recompose avec d’autres espèces, un animal qui régénère un membre perdu… tous incarnent et diversifient cette intelligence de la reconstruction.

Pour nous, humains, la résilience demande la même « créativité » : apprendre du choc, adapter nos modes de vie, inventer des solutions nouvelles plutôt que rêver d’un simple retour “comme avant”. C’est une science, mais aussi un art : celui de persister dans un monde qui change.

Est ce difficile de parler d’écologie sur les réseaux sociaux ?

Parler d’écologie sur les réseaux, c’est un peu comme tenter de semer une graine dans un sol instable.

Oui, c’est difficile : les sujets sont complexes, parfois angoissants ; les plateformes amplifient souvent le clash et les sujets clivants plus que la nuance et l’action collective, le militantisme, et on est vite accusé de moraliser ou de décourager.

Mais ce n’est pas impossible. Je crois au fait de raconter des histoires, faire rêver les gens, montrer des chemins d’action, utiliser des formats vivants, pour créer de l’émotion et de l’impact.

Je crois que cette façon humaine de communiquer crée un espace où l’on avance ensemble. Et à sa manière, prendre la parole sur l’écologie aujourd’hui, c’est déjà pratiquer la résilience : continuer à imaginer et à transmettre malgré l’incertitude.